Le 15 août 2025, les talibans ont commémoré à Kaboul le quatrième anniversaire de leur retour au pouvoir en Afghanistan. L’événement, qualifié de « jour de la Victoire », a été marqué par des rassemblements dans la capitale, alors que le pays traverse encore de profondes difficultés économiques et reste largement isolé sur la scène internationale.
Célébrations dans la capitale afghane
À Kaboul, des talibans ont défilé en brandissant les drapeaux de l’« Émirat islamique d’Afghanistan », symboles omniprésents lors de la cérémonie. Des hélicoptères ont également survolé la ville et jeté des fleurs au-dessus du centre-ville. Certains participants ont mis en avant des bidons jaunes, rappelant les engins explosifs artisanaux utilisés pendant la guerre opposant le mouvement aux forces occidentales entre 2001 et 2021, selon des journalistes de l’AFP.
Un programme revisité
Contrairement aux années précédentes, le traditionnel défilé militaire prévu sur la base aérienne de Bagram a été annulé. L’accent a plutôt été mis sur une série de discours prononcés par des responsables talibans à l’université polytechnique de Kaboul. Le chef suprême du mouvement, Hibatullah Akhundzada, absent de la cérémonie, a adressé un message écrit saluant ce qu’il a décrit comme un climat de sécurité inédit depuis des décennies et affirmant que le pays, régi par la loi islamique, avait été préservé de la corruption, du vol et de la drogue.
Un pays confronté à de graves difficultés
Malgré les déclarations officielles, la situation économique du pays reste préoccupante. Selon les données de la Banque mondiale, près de la moitié de la population vit dans la pauvreté, et environ un quart des jeunes âgés de 15 à 29 ans est touché par le chômage. L’ONU classe toujours l’Afghanistan parmi les pays faisant face à l’une des crises humanitaires les plus graves au monde.
Des attentes sociales insatisfaites
Dans la ville de Jalalabad, des habitants ont participé aux commémorations tout en exprimant leurs préoccupations. Un agriculteur de 45 ans, interrogé par l’AFP, a indiqué espérer une lutte plus efficace contre le chômage, cause selon lui de l’émigration croissante des Afghans en situation de précarité.
Une reconnaissance internationale limitée
Sur la scène extérieure, les talibans ont remporté une victoire diplomatique avec la reconnaissance officielle de leur gouvernement par la Russie. Toutefois, la plupart des pays ne leur ont pas accordé cette légitimité. Les autorités talibanes entretiennent néanmoins des relations, parfois informelles, avec certains États d’Asie centrale, la Chine ou encore les Émirats arabes unis. Des échanges ont également eu lieu avec des diplomates norvégiens, britanniques et américains.
La question des droits des femmes au centre des critiques
L’absence d’accès des filles à l’éducation secondaire et supérieure, leur exclusion de nombreux emplois et lieux publics, ainsi que la fermeture d’instituts de beauté et de salles de sport, suscitent des condamnations internationales. Début juillet, la Cour pénale internationale a émis deux mandats d’arrêt, dont un contre l’émir Hibatullah Akhundzada, pour des accusations de persécution visant les femmes, considérée comme un crime contre l’humanité.
Réactions et enjeux internationaux
L’Association révolutionnaire des femmes d’Afghanistan (RAWA) a rejeté les annonces des talibans, estimant que leurs décisions privaient la population des droits fondamentaux. Pour plusieurs experts, les États occidentaux doivent composer avec des enjeux multiples, notamment sécuritaires et migratoires. Ibraheem Bahiss, chercheur auprès de l’International Crisis Group, estime par exemple que, malgré une opposition aux mesures prises contre les femmes, certains pays européens poursuivent des discussions afin de gérer les flux migratoires depuis l’Afghanistan.
Appel à la vigilance de l’ONU
Jeudi, plusieurs rapporteurs spéciaux de l’ONU ont exhorté la communauté internationale à ne pas normaliser ses relations avec le gouvernement taliban. Ils qualifient ce dernier de « régime violent et autoritaire » et estiment que son exercice du pouvoir se fait « sans légitimité ». Selon eux, la situation actuelle en Afghanistan ne doit pas être considérée comme inévitable ou irréversible.
À l’approche de cette date symbolique, les célébrations organisées par les talibans contrastent ainsi avec les critiques persistantes de la communauté internationale et les difficultés socio-économiques rencontrées par la population afghane.