Autodiagnostics en santé mentale sur les réseaux sociaux : risques et limites
Une vidéo virale sur TikTok met en scène un jeune homme évoquant les trois grands types de TDAH et présentant l’un d’eux comme le trouble inattentif sans hyperactivité, suggérant qu’on peut s’autodiagnostiquer à partir de symptômes et partager le résultat en ligne. Cette-très grande accessibilité des auto-évaluations alimente une pratique croissante sur les réseaux.
Cependant, si l’autodiagnostic peut favoriser les échanges et contribuer à déstigmatiser certains troubles, il s’accompagne de risques notables et d’interrogations sur la fiabilité des informations.
FAUSSES INFORMATIONS
Le principal danger réside dans les faux positifs: on peut se croire atteint d’un trouble alors qu’il s’agit peut-être d’une simple difficulté de concentration sans altérations majeures. Une étude de l’Université de Montréal analysant 1000 vidéos sur la santé mentale publiées sur TikTok a montré qu’une publication sur cinq contenait des informations trompeuses.
Selon Joël Billieux, professeur de psychologie clinique et d’évaluation psychologique à l’Université de Lausanne, se penser atteint peut pousser vers des traitements inadaptés ou des démarches d’auto-soin via des ressources en ligne, sans validation par des professionnels.
« Imaginer qu’on peut se diagnostiquer avec un auto‑questionnaire est irréaliste sur le plan médical », rappelle-t-il, soulignant que ces outils ne remplacent pas une évaluation clinique.
ÉVALUATION PROFESSIONNELLE NÉCESSAIRE
La multiplication des auto-tests ne constitue pas une finalité et ne remplace pas une démarche professionnelle complète. Des experts insistent sur le fait que le diagnostic repose sur une collecte d’informations auprès des proches et des enseignants, ainsi que sur d’autres méthodes d’évaluation. Le processus peut nécessiter un à trois entretiens à différents moments pour vérifier la stabilité des symptômes.
TENDANCE À ÉTIQUETER TOUT LE MONDE
Joël Billieux souligne que cette prolifération d’autodiagnostics reflète une tendance sociétale à tout qualifier de trouble. Il rappelle qu’un trouble psychiatrique implique un dysfonctionnement dans la vie quotidienne et une souffrance psychologique, et qu’il ne faut pas confondre ces situations avec des variations individuelles de personnalité ou de styles d’apprentissage.
À termes, les auteurs insistent sur le fait que les auto-tests peuvent inciter à consulter, mais ne remplacent pas une évaluation clinique approfondie conduite par des professionnels de la santé.
Crédits: reportage et couverture associée par Alexandra Richard et Antoine Schaub.